Cinquième principe (4)

Cinquième principe : quatrième section

Tout ce que nous avons écrit s'applique même s'il n'a parlé de son manque de sagesse seulement dans les matières profanes. C'est d'autant plus vrai s'il s'agit d'une personne que les citoyens de la ville considèrent comme sage en matière de Torah, et qu'il a affirmé qu'il n'était pas si sage, et qu'il ne connaissait pas grand-chose en Torah. À cause de ces paroles, les gens en ont perdu leur respect pour lui. Ces paroles entrent sans aucun doute dans la catégorie du lashone har'a, même si elles sont vraies, puisque [celui qui parle ainsi n'en tire aucun] bénéfice, mais qu'il ne parle que pour abaisser son prochain dans l'estime de ses auditeurs. Ces paroles [comme on l'a vu] peuvent causer des dommages, de la peine et du désarroi. Je vais prendre deux exemples.

Si quelqu'un dit en public du Rabbin de la ville qu'il connaît un peu les décisions halakhiques qui s'appliquent en pratique, mais qu'il manque de sagesse en Torah, même si c'est vrai, c'est incontestablement du lashone har'a d'après la Torah. Il a en effet diminué l'honneur de son prochain, et mis en péril ses moyens de subsistance. Il s'est [également] attaqué à l'honneur de la Torah et l'accomplissement des mitsvot (comme on l'a vu dans la deuxième section).

C'est également vrai s'il dit le même genre de choses au sujet de quelqu'un qui vient de se marier dans la ville. Il est fort probable qu'en fin de compte, son honneur soit bafoué aux yeux de sa belle-famille, et des membres de sa maison, lorsqu'il viendra à leurs oreilles qu'il est une personne de peu de poids dans la cité. Il n'est pas de plus grand dommage et de plus grande souffrance.

Il m'est difficile de donner tous les exemples possibles, mais il est écrit : « Donne à un homme sage, il deviendra plus sage encore. » (1) Je ne suis venu que pour éveiller, et l'homme sage comprendra toutes ces choses par lui-même.

Sache aussi que la même chose s'applique à celui qui dit d'un ouvrier qu'il n'est pas un bon ouvrier. Cela aussi est sans aucun doute du lashone har'a, car tous les arguments évoqués plus-haut sont pertinents dans ce cas. Si dans ce cas et dans les autres cas dont nous avons parlé, son intention n'était pas de dénigrer, mais il cherchait un profit personnel, ce problème sera traité, avec l'aide de D., dans le chapitre 10 des lois de rékhilout.)

Cinquième principe : cinquième section

Nous allons à présent expliquer ce que nous avons écrit plus haut (deuxième section) (2) quant au fait de [dénigrer son prochain] « au sujet de sa force. » Par exemple, dire de quelqu'un, face aux gens de la cité, qu'il est par nature un homme faible. Le din [la règle applicable] dépend [dans ce cas des circonstances]. Si, selon la situation, [la personne concernée] peut subir un préjudice, s'il est journalier par exemple, ou enseignant (et il y a de nombreux autres cas du même genre), ce qui a été dit entre indiscutablement dans la catégorie du lashone har'a. Quand il est question de la « richesse », c'est-à-dire lorsqu'on déclare aux oreilles de tous que Untel est pauvre, et sans ressources, « comme on le dit en ville », et que tout ce qu'il possède, il le doit à autrui. Cela aussi entre dans la catégorie du lashone har'a. En effet, si de telles paroles se répandent dans le public, il ne trouvera plus personne ensuite pour lui faire crédit, et cela peut être une cause de dommage et de désarroi, et menacer jusqu'à ses moyens de subsistance. Par-dessus tout, un homme de cœur (s'il ne recherche pas un bénéfice [particulier]) veillera à ce qu'aucun préjudice ne résulte [de ses paroles] pour celui dont on parle. Si dans tous ces cas, il parle ainsi dans l'espoir d'obtenir un certain avantage, cette situation (les circonstances et les moyens) sera traitée plus loin avec l'aide de D. (3)

On doit en tout cas prendre grand soin de ne pas se montrer permissif trop hâtivement en disant : « Je n'ai pas l'intention de dénigrer Untel, mais je cherche à obtenir tel ou tel avantage », car beaucoup de détails doivent être considérés.

Cinquième principe : sixième section

Il te faut aussi connaître un principe de base s'agissant du lashone har'a : il dépend de la personne dont on parle. De sorte qu'il est tout-à-fait possible, en disant la même chose au sujet de deux personnes différentes, de faire l'éloge de l'une et du lashone har'a sur l'autre ! Par exemple, si l'on dit d'une personne qui dépend d'autrui pour sa subsistance, et n'a pas de problème à ce sujet, qu'il étudie la Torah trois ou quatre heures par jour, ce serait la dénigrer gravement et se rendre coupable de lashone har'a. Mais si l'on dit la même chose de quelqu'un qui gagne sa vie à grand-peine, c'est un très grand éloge ! (4)

La même chose s'applique à d'autres exemples d'accomplissement de mitsvot positives, comme le devoir de faire honneur au Shabbat. Si l'on dit d'un des pauvres de la ville qu'il dépense telle et telle somme (pour lui considérable) pour honorer le saint Shabbat, c'est en sa faveur un grand éloge. Mais si l'on dit exactement la même chose de quelqu'un qu'on considère comme un homme riche, il s'agira d'une médisance, qui fera de cet homme un objet de mépris. Celui qui a prononcé de telles paroles s'est rendu coupable de lashone har'a.

Le même principe s'applique à la mitsva de tsédaqa. Tout dépend de la situation financière [de la personne dont on parle]. Ce qui est un éloge pour l'un est injurieux pour l'autre. Il en va de même pour les commandements « ben adam laḥavéro ». Si l'on dit d'une personne moyenne qu'il se comporte de telle et telle manière avec ses employés, ce n'est pas le dénigrer. Mais si l'on dit la même chose d'une personne de haute stature en Israël, ce sera un grave discrédit. Il y aurait de nombreux autres exemples, et il est difficile d'énumérer dans un livre tous les cas où une personne peut se laisser aller au lashone har'a.

Mais fais des paroles du Rambam « une couronne pour ta tête » : « Que la médisance soit proférée en la présence ou en l'absence de son prochain, ou bien qu'elle soit répandue de bouche à oreille, si elle cause un préjudice à son prochain, à son corps, à ses biens, ou qu'elle soit pour lui une cause d'angoisse ou de détresse pour son âme, sache qu'il s'agit de la faute d'une mauvaise langue ! » (5)

Prends garde, mon frère, aux ruses de l'inclination au mal, qui [cherchera à] te tromper en disant : « Mais Ḥazal n'ont-ils pas dit : ''Ce que tu détestes, ne le fais pas à autrui'' ? (6) Qu'ai-je dit à son sujet ? Qu'il n'étudie la Torah que trois à quatre heures par jour ? Ai-je le devoir de l'aimer plus que moi-même ? J'aimerais qu'on dise de moi que j'étudie la Torah trois à quatre heures par jour ! »

De même pour la Tsedaqa, les dépenses [en l'honneur] du Shabbat, etc.

C'est une erreur, en vérité. Car le sens [que Hillel donne dans] la Guémara à la formule « ce que tu détestes », c'est « tout ce que tu détesterais si tu te trouvais dans la situation de ton prochain. » Et en vérité, cela dépend de la personne dont on parle, du lieu et de l'époque. Si, selon les circonstances, [les paroles prononcées] ont le caractère du dénigrement, il s'agit certainement de lashone har'a selon le din.


Mis en ligne le 17 Av 5782 (16 août 2022)












1 Mishléi - Proverbes 9,9 : «תֵּ֣ן לְ֖חָכָם וְיֶחְכַּם־ע֑וֹד הוֹדַ֥ע לְ֜צַדִּ֗יק וְי֣וֹסֶף לֶֽקַח »










2 Voir 5ème principe section 2 : « Il est interdit de faire honte à son prochain à cause d'une insuffisance qui le caractérise, en sagesse, en force, en richesse etc. »













3 V. 2è partie, Principe 9.












4 Il est clair que pour une personne qui n'a pas besoin de travailler dur pour gagner sa vie, trois ou quatre heures d'étude quotidienne sont insuffisantes, comme il est écrit : « לֹא-יָמוּשׁ סֵפֶר הַתּוֹרָה הַזֶּה מִפִּיךָ - Ce livre de la Torah ne doit pas quitter ta bouche, [tu le méditeras jour et nuit afin d'en observer avec soin tout le contenu] » (Yéhoshou'a - Josué 1,8). Inversement, si, malgré les difficultés qu'il doit affronter pour gagner sa vie, un homme parvient tout de même à étudier la Torah plusieurs heures par jour, il sera évidemment considéré comme particulièrement méritant. Voir la discussion de ce principe en Berakhot 35b.











5 Hilkhot dé'ot 7.



6 Shabbat 31a : Un païen alla trouver Shammaï et lui demanda de lui apprendre la Torah tandis qu'il se tiendrait sur un pied. Shammaï le chassa à coups de règle (il était architecte ou maçon). Le païen alla trouver Hillel avec la même question. Hillel lui répondit : « Ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui. Voilà toute la Torah. [...] Va et étudie. »

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